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Tout d’abord, il y a cette éternelle et récurrente question, 35 ou 50mm ? Chacun trouvera des arguments pour mettre en avant son petit préféré. Cadrage plus large et universel du 35mm ou choix d’une focale au cadre plus limitée mais que certains estiment plus proche de la vision humaine.

Pour ma part,  ma préférence est faite même si dans le domaine des choix de focales, les choses évoluent malgré tout et parfois dans un sens inattendu. Je dois avouer que j’ai beaucoup travaillé au 35mm mais depuis quelques temps, mon choix se porte plus naturellement vers le 50mm que je trouve plus créatif avec un rendu des perspectives et des arrières plans que je trouve plus intéressants.

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Ceci étant dit, le 50mm est devenu ma focale de prédilection et j’ai donc cherché dans la pléiade d’objectifs en monture Leica à disposition celui ou ceux qui pourraient me donner satisfaction. J’ai commencé assez naturellement  par le Summicron 50mm V5 qui est un grand classique et bien souvent la première optique des débutants chez Leica.

Je vous propose une petite revue d’effectif des acteurs principaux de la gamme 50mm.

Le Summicron 50 mm f/2,0 Version V (version actuelle) :

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Comme tous les objectifs Leica, il est bien construit et son rapport qualité/prix est excellent. Il se trouve facilement en occasion car c’est un objectif qui est revendu fréquemment pour évoluer dans la gamme. Relativement compact, il lui manque cependant la célèbre gâchette de doigt propre aux optiques Leica et la mise au point se fera par une bague cylindrique classique. Cette bague étant particulièrement fluide, il n’y aura donc pas de problème majeur  de manipulation et la précision est bonne.

Non asphérique, cet objectif est malgré tout une optique qualitative, au piqué de très bon niveau et la pleine ouverture pourra être utilisée sans restriction. Moins créatif que les autres 50mm de la gamme, son rendu droit et précis, sans fioriture en fera malgré tout un compagnon fidèle et à l’aise dans toutes les circonstances. Un très bon objectif que je recommande chaudement en occasion aux alentours de 900/1000 euros selon l’état et les accessoires fournis.

Le Summicron 50 f/2,0 Version II dit « Rigid » (1956-1968) :

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Voici un objectif intéressant. Très performant et esthétique, son rendu est effectivement celui d’un Summicron. Sa filiation à cette famille ne se renie pas à partir de f/4,0. Aux plus grandes ouvertures, il permettra d’obtenir des images douces et détaillées, plus proche de celles d’un Summilux.

Avec son look vintage des années soixante, il se présente sous version chromée avec une petite gâchette spécifique et une bague cannelée du plus bel effet. Particularité, cette gâchette se bloque sur la position « infini » et doit être déverrouillée pour refaire la mise au point sur des distances plus rapprochées. Cette particularité agace souvent les propriétaires de cet objectif.

Pour une optique de cet âge, le rendu sur boitier numérique est assez incroyable. Le piqué est excellent mais devra être un peu punché aux plus grandes ouvertures pour celui qui aime les images très nettes. De la même manière, les micro-contrastes devront être  un peu plus poussés pour rendre à l’image tout son potentiel. Mais une fois quelque peu musclées, les images obtenues avec ce Rigid sont excellentes, à mi-chemin entre le Summicron et le Summilux pour le rendu. Caractéristique des optiques de cette époque, il allie douceur et netteté de très haut niveau.

Très surprenant en termes de performances sur les boitiers numériques, cet objectif qui se trouve en occasion aux alentours de 800 euros donnera à son utilisateur entière satisfaction pour celui qui aime les objectifs avec un rendu plus caractéristique de l’ère argentique.  Excellent objectif et prix réduit, un must…

Le Summilux 50mm f/1,4 Asphérique (version actuelle) :

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C’est pour moi est sans conteste le meilleur rapport qualité/prix des optiques Leica, toutes focales confondues. Ses performances sont excellentes quelle que soit l’ouverture choisie et si il donne la sensation d’être moins droit et piqué que le Summicron, il a à mon sens un rendu plus créatif par sa capacité plus grande à isoler le sujet principal de la composition. A l’instar du 35 mm de la même famille, il dispose du système de lentilles à éléments flottants et de toutes les technologies modernes associées ; lentilles asphériques, verres à indice de réfraction élevé…

On pourra lui reprocher un manque de compacité dans la gamme 50mm mais il reste néanmoins de dimension, d’encombrement et de poids plus que raisonnable pour un 50mm plein format.

J’ai possédé et beaucoup aimé cet objectif. Son rendu est excellent et sa capacité à restituer les scènes avec un effet 3D est reconnu unanimement, à juste titre. Aux grandes ouvertures, les coins auront tendance à filer un peu mais les photos faites entre f/1,4 ou f/2,0 ne souffrent pas forcément de ce défaut car isoler un sujet se réalise bien souvent au détriment de la qualité d’image sur les bords. Cela pourra par contre être un inconvénient si l’on souhaite décadrer l’image aux très grandes ouvertures car la perte sera parfois palpable. Dès que l’on ferme le diaphragme (à partir de f/4,0), les performances deviennent parfaites sur tout le champ. Cet objectif sera donc très polyvalent et permettra de s’essayer au paysage ou au portrait avec le même bonheur.

Lorsque je prétends que c’est le meilleur rapport qualité/prix des optiques Leica, c’est à mon sens une évidence car il permet d’accéder à un très haut niveau de performances pour un prix plus que correct dans la gamme Leica (3250 euros). En neuf, ce pourra être l’objectif de base d’un système M. En occasion, aux alentours de 2200 euros, c’est une affaire presque incontournable pour celui qui souhaite un 50mm de très haute tenue.

J’ai eu plutôt du mal à me séparer de cette optique attachante, performante. Imparfait mais au combien créatif, je le reprendrai sans hésitation (d’occasion) si le besoin s’en faisait sentir.

Le Voigtlander Nokton 50mm f/1,1 (version actuelle) :

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Ce qui démarque cet objectif des autres est son ouverture extrême pour un prix considéré dérisoire face à la gamme Leica (900 euros environ). Vu sous cet aspect, il est évident que le rapport qualité/prix/performances/possibilités est intouchable et permettra de disposer d’un objectif performant.  Son prix est en réalité plus de dix fois inférieur à celui d’un Noctilux f/0,95.

Pour avoir testé cet objectif plusieurs semaines, le constat que je ferais serait plutôt positif. La construction est bonne sans être au niveau d’un Leica. Relativement compact et discret, c’est un objectif de très bon niveau avec un rendu différent de celui des Leica. Moins contrasté que les Noctilux, notamment aux très grandes ouvertures, il atteint un excellent niveau à partir de f/2,8. Les ouvertures extrêmes seront plus dévolues à une volonté créative ou au portrait pour un rendu très doux.

J’aurais tendance à lui préférer les Noctilux car je suis plus à la recherche d’optiques au contraste plus prononcés.  Aux très grandes ouvertures, ce Nokton délivre des images très douces, avec un léger effet de nimbé qui séduira sans doute les amateurs de portraits. Asphérique, donc adapté au numérique, il aura un rendu plus classique qu’un Noctilux f/1,0 mais il sera moins magique que ce dernier. Pourtant il souffrira moins de vignettage et son rendu global sur l’ensemble du champ sera plus homogène.

Au final, un objectif très attachant aussi, très performant à partir de f/2,8, il pourra être le 50mm à tout faire même si sa compacité le dessert par rapport à un Summilux nettement plus performant à toutes les ouvertures. Simplement, sa propension aux très faibles luminosités et son prix hors catégories peuvent en faire un excellent choix de 50mm, y compris pour un choix de 50mm unique.

Le Summicron 50mm f/2,0 APO Asphérique (version actuelle) :

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Il y a quelques mois, j’ai écris un article complet sur cet objectif…

https://fae59.com/2014/07/02/50mm-apo

Ce 50mm est à mon sens hors catégorie et pour plusieurs raisons.

La première, c’est son prix. 6550 euros pour un 50mm qui ouvre à f/2,0. Beaucoup crient à la folie, à la démesure et considèrent cette optique comme un non sens ou un caprice de Leicaiste intégriste. En toute honnêteté, j’ai moi-même tenu plus ou moins ce discours avant de l’avoir testé. Et puis, à la découverte des images, on mesure immédiatement ce qui différencie une excellente optique d’un objectif exceptionnel.

Sans vouloir réécrire ce que j’ai développé dans l’article,  cet objectif est véritablement  exceptionnel. Et là, plus de recherche de rationalité sur le rapport qualité/prix. Le choix de ce 50mm ne se fera que sur le critère de la qualité de restitution. Et sur ce point, zéro défaut…

La deuxième raison qui rend cet objectif hors catégorie, ce sont ses performances. Bien évidemment, un 50mm qui ouvre à f/2,0 et à ce prix, on est en droit d’attendre des performances encore jamais atteintes. Et bien rassurez vous, c’est bien le cas. A pleine ouverture et sur tout le champ de l’image, quelle qu’elle soit, le piqué est présent. Et quel piqué !  Pas celui des optiques que je qualifierais de numérisé avec des transitions coupées à la serpe. Une netteté naturelle avec une transition des plans progressive et veloutée, un modèle de subtilité et de raffinement. Un vrai régal des yeux quel que soit le sujet, la distance ou l’ouverture choisie. Son rendu fait souvent penser aux images issues des matériels moyen-formats. L’effet 3D plus caractéristique des Noctilux est bien présent malgré son ouverture minimale nettement plus modeste.

La troisième raison sera son extrême polyvalence. Plus compact et discret encore qu’un Summilux, il permettra d’exceller dans tous les domaines de la photographie au 50mm. Portrait doux et piqué à la fois aux grandes ouvertures, photos de rue ou de paysages en fermant un peu, cet objectif sera toujours et en toutes circonstances au sommet de ce que l’on attend d’un objectif. Il permettra notamment de décadrer sans contrainte de choix d’ouvertures et sans perte de qualité.

Le mot qui me vient à l’esprit pour cet objectif, c’est transparence. Les images réalisées avec ce Summicron semblent transpercées par la lumière. Ce 50mm a la capacité de capter la lumière de façon unique pour un rendu d’une luminosité pour moi sans égal.

Le Noctilux 50mm f/0,95 (version actuelle) :

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Fleuron de la gamme optique Leica, cet objectif est une véritable performance technologique car il s’agit de l’optique la plus lumineuse du monde en plein format. Son prix est aussi stratosphérique (9300 euros) mais comme pour le Summicron 50mm APO, cet objectif est exceptionnel dans sa capacité à restituer les images en très faible lumière.

Pour parler immédiatement des contraintes de cet objectif (au delà du prix), il est lourd, encombrant et bien moins discret qu’un Summicron ou un Summilux. Pour celui qui a choisi le Système M Leica pour sa compacité et le poids réduit, ce Noctilux n’est plus véritablement dans cette philosophie.

Au rayon des avantages, la première remarque sera bien sûr la très grande luminosité  et sa capacité à faire des images dans des conditions de lumière très dégradées. La bague de mise au point a une course nettement plus réduite que le Noctilux f1,0. Je ne trouve pas que cela est spécifiquement un avantage car les Noxtilux demandent une précision importante et à mon sens de par leur profondeur de champ très réduite, un course de bague plus courte augmente les risques d’erreur de mise au point. C’est en tout cas ce qu’il ressort des tests que j’ai réalisés.

En portrait et à pleine ouverture, ce Noctilux permettra des effets inégalés. Mais attention, ces effets doivent êtres maîtrisés car la très faible profondeur de champ peu facilement conduire à des rendus inesthétiques. Pour dompter un Noctilux, il faut un peu de temps. En photo de rue, l’effet 3D se reconnait presque immédiatement. Le détachement de la zone de netteté est impressionnant et est tellement caractéristique qu’une photo réalisée au Noctilux et à pleine ouverture s’identifie bien souvent au premier coup d’œil.

La construction est impressionnante de qualité. Affublé de toutes les améliorations nécessaires pour une version plus numérique, il dispose d’élément flottants et de verres Asphériques notamment. Ceci a permis notamment de gommer le vignettage important à pleine ouverture constaté sur la version précédente.

Personnellement, je trouve ce Noctilux excellent bien sûr mais moins magique que la version précédente, le Noctilux f/1,0. Ce dernier a sans conteste plus de défauts que le petit nouveau mais le rendu créatif du f/1,0  est à mon sens plus élevé. Pour faire un parallèle avec le monde de la moto, le Noctilux f/0,95 serait une Triumph puissante et sûre. Le Noctilux f/1,0 serait plus proche d’une Harley-Davidson, plus inconfortable et moins sécurisante mais qui procure des sensations uniques pour avaler la route.

Le Noctilux 50mm f/1,0 (1976-2008) :

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Le plus magique et créatif à mon sens.  Avec son rendu parfois psychédélique, ce Noctilux est excellent pour celui qui aime les objectifs un peu plus fou. Le rendu est magnifique car il allie un piqué naturel mais bien présent à un effet 3D très beau et réel.

Plus compact que la version actuelle, la construction est sans défaut et d’une robustesse  sans concession. Il est aussi plus léger que la version f/0,95. Avec une très faible profondeur de champ, il permet lui aussi de détacher nettement les plans et de créer des effets 3D magnifiques.  Il faudra par contre surveiller les rendus dans le bokeh qui peuvent être parfois disgracieux. Le vignettage à pleine ouverture est bien présent et parfois gênant. La bague de mise au point avec sa course longue parfois critiquée et corrigée sur la dernière version permet néanmoins une grande précision que j’apprécie vraiment sur une optique aussi pointue.

Bien évidemment, pour trouver cet objectif, c’est vers le marché de l’occasion qui faudra se tourner. Son prix variera, selon son état et les accessoires fournis entre 3200 et 4600 euros. Il existe 4 versions de ce Noctilux f/1,0 qui l’on différenciera dans un premier temps par le diamètre de l’optique, la première version étant en 58mm, les suivantes en 60mm ou dans un deuxième temps par les pare-soleils à baïonnette ou clipser ou encore comme pour la dernière version dont le pare-soleil est amovible et intégré à l’optique.

Ci-dessous, un tableau de toutes les versions de Noctilux. A noter la première version avec une ouverture maximale à f/1,2.

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En conclusion :

Bien évidemment, il ne s’agissait pas pour moi de faire une revue exhaustive de tous les 50mm existants pour Leica sur le marché. Il existe vraisemblablement d’autres modèles très intéressants qui auraient eu toute leur place dans cet article. Je pense notamment aux optiques Zeiss ou autres modèles de Voigtlander. Il y a aussi le 50mm Summarit (gamme largement sous-estimée à mon avis) qui vient d’être mis à jour par la marque allemande et qui peut être une excellente alternative notamment lors d’un premier achat Leica.

En réalité, je me suis attaché à ne présenter que mes impressions  par rapport à des objectifs que j’ai possédés ou testés suffisamment pour émettre un avis et un véritable ressenti cohérent.

Le point commun de tous ces 50mm est leur grande qualité. Sur ce point, je dirais que n’importe lequel de ces objectifs sera forcément un bon choix. Ce sont les qualités et défauts qui feront la différence lors du choix. Un choix qui devra se faire sur la priorité donnée à tel ou tel critère.

Il est parfaitement impossible de choisir une optique pour quelqu’un, tout juste est il possible de faire partager son expérience pour essayer de guider les autres dans leurs hésitations. C’est ce que j’ai voulu faire dans cet article.

Alors pour conclure et m’engager malgré tout car je n’entends pas me défiler, voici mes suggestions…

Sans considération de prix, le Summicron APO 50mm est sans contestation possible le meilleur choix car le plus qualitatif, le plus compact et le plus polyvalent. Son côté discret sans en avoir l’air cache des qualités optiques qui sont de l’ordre de la perfection. Aucun doute possible, c’est le meilleur 50mm jamais produit.

Pour le côté spectaculaire et toujours sans connotation de prix, le Noctilux 50mm f/0,95 avec son effet 3D est très spectaculaire et ses performances de très haut niveau raviront son propriétaire. Je suis plus réservé sur son côté plus droit et ses dimensions et poids.

Le Summilux 50mm est un incontournable. Condensé des qualités des autres (Noctilux, Summicron), il est une synthèse intéressante et son prix en occasion en font un rapport qualité/prix difficilement égalable. Ses quelques défauts (moins compact, bords en retrait à pleine ouverture) ne seront que de petites contraintes au regard des énormes qualités de cet objectif.

Pour les petits budgets ou pour démarrer en douceur, le Nokton et les Summicron Version II ou version actuelle sont de formidables outils à prix tout doux. Déjà très qualitatifs, ils seront à l’aise en toutes circonstances et ne décevront jamais leurs utilisateurs.

Reste le Noctilux f/1,0 qui pour moi est un peu une énigme. De conception des années 70, il a le pouvoir de captiver par sa restitution. Radicalement différent de ce que j’avais pu voir jusque là, cet objectif vit une carrière atypique dans le monde du numérique. Sa cote remonte car les résultats constatés avec cette optique (malgré des défauts indéniables) sont proprement magiques pour celui qui aime ce rendu parfois féerique…

Pour finir et illustrer mon propos, voici une galerie d’images réalisées avec les 50mm évoqués ci-dessus. Images prises avec Leica M240, Leica M9, Leica M Monochrome, Ricoh GXR…

Cliquez sur la première image voir voir la galerie…